Séminaire MSH Bordeaux

Axe 2 Sociétés inclusives

Salle Jean Borde – 9h30-12h30

Professeur invité: Giovanni Poggeschi, Professeur des Universités en Droit public comparé Università del Salento, Lecce (Italie)

Les droits (et devoirs) linguistiques relèvent de trois catégories. Les droits linguistiques de première catégorie visent à l’intégration : la langue n’est pas un objet juridique à protéger mais plutôt l’instrument avec lequel on permet l’exercice des droits fondamentaux, y compris aux personnes qui ont une langue étrangère pour langue maternelle.

Les droits linguistiques de deuxième catégorie sont les droits des minorités nationales, ou linguistiques, ou historiques, selon les différentes terminologies qui, de toutes façons, reflètent la même réalité : celle des communautés ayant un ancrage historique avec le territoire où elles habitent et dont les membres sont des citoyens de l’État.

Enfin, les droits linguistiques de troisième catégorie font référence aux étrangers et à leurs descendants, ensemble d’individus qui en anglais est défini par l’expression « persons with a foreign background ».

La relation entre les droits (et devoirs) linguistiques de première et de troisième catégorie est assez évidente : les deux catégories concernent les personnes qui ont des racines à l’étranger, ayant ou non la nationalité du pays où elles vivent.

Dans le séminaire on abordera l’évolution, en Europe – et notamment en Italie, Allemagne, France et Espagne – des droits et devoirs linguistiques de troisième catégorie. On verra que le volet « devoir/intégration » est plus fort que le volet « droit/diversité », et ce pour différentes raisons – sociales et psychologiques. En gros, la société pousse plus à l’intégration linguistique dans la langue de la majorité qu’à la conservation de la langue de la communauté d’origine. On analysera dès lors les normatives principales en vigueur en Europe concernant le devoir d’apprendre la langue du pays d’accueil par les étrangers, surtout lorsque ces derniers sont obligés de passer un examen certifiant la connaissance de la langue officielle du pays de résidence.

Il existe pourtant des expériences de valorisation des langues d’origine des « nouvelles minorités » : un exemple déjà classique est celui, en Allemagne, des « Müttersprachlicher Ergänzsunterricht » (« cours supplémentaires en langue maternelle »), suivis par des garçons et des filles de dizaines d’origines linguistiques différentes, qui sont maintenant appelés « Herkunftssprachlicher Unterricht » pour souligner la souche (Herkunft) communautaire plutôt que la dite langue maternelle, souvent oubliée. Ces cours sont encore très suivis dans le Nordrhein-Westfalen, le plus peuplé des Länder, mais sont en crise en Bavière, pour des raisons politiques.

Nous présenterons en conclusion une expérience de terrain, observée dans le cadre d’un Institut technique secondaire de Novoli (Lecce). Dans cette structure l’intégration de nombreux membres de la communauté sénégalaise ne se fait normalement pas en wolof, mais en français. Cela amène à considérer le rôle des langues internationales qui, pour des raisons historiques, font partie de l’héritage culturel d’un pays, en l’occurrence le Sénégal. Il s’agit d’un phénomène important dans la jouissance des droits de troisième catégorie, qui unit certains peuples au nom de la francophonie.

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